Vecteur propre et valeur propre
Pour une matrice
Soit
A ∈ ℳn(R) une
matrice carrée
et
λ ∈ R.
Un vecteur colonne X non nul est appelé vecteur propre pour la matrice A associé à la valeur propre λ si on a AX = λX.
L’ensemble des valeurs propres de A s’appelle le spectre de A et se note Sp(A).
- Tout vecteur colonne non nul de taille n est vecteur propre pour la matrice identité de taille n pour la valeur propre 1.
- Tout vecteur colonne non nul de taille n est vecteur propre pour la matrice nulle de taille n pour la valeur propre 0.
- Si D = Diag(λ1, … , λn) est une matrice diagonale alors tout vecteur colonne élémentaire Ei est un vecteur propre associé à la valeur propre λi.
- La matrice [[0 ;1][−1 ;0]] n'admet pas de valeur propre réelle.
Une matrice carrée est
inversible si et seulement si elle n'admet pas 0 comme valeur propre.
Une matrice carrée
A est inversible si et seulement si
son noyau est nul, c’est-à-dire s’il n’existe aucun vecteur colonne
X non nul tel que
AX = 0, ce qui revient au fait que
0 n’est pas valeur propre.
Soit λ ∈ R. Une matrice carrée A de taille n admet la valeur propre λ si et seulement si la matrice A−λIn n'est pas inversible.
Pour tout vecteur colonne
X, on a les équivalences
AX = λ·X
⇔ (A − λ·I)X = 0
⇔ X ∈ Ker(A − λ·In),
donc
λ est valeur propre si et seulement si le noyau de
(A − λ·I)
est non nul, c’est-à-dire si
A − λ·I n’est pas inversible.
La forme de certaines matrices donne aussi certains résultats.
Les valeurs propres d’une
matrice triangulaire (supérieure ou inférieure) sont les coefficients diagonaux de la matrice.
Soit T une matrice triangulaire dont les coefficients diagonaux s’écrivent a1, … , an.
Pour tout λ ∈ R, la matrice T − λ·In est triangulaire et ses coefficients diagonaux s’écrivent a1 − λ, … , an − λ,
et la matrice T − λ·In n’est pas inversible si et seulement si l’un de ces coefficients est nul.
Une matrice a les mêmes valeurs propres que sa
transposée.
Soit A ∈ ℳn(R) et λ ∈ R.
On a les équivalences suivantes :
λ ∈ Sp(A)
⇔ A − λ·In non inversible
⇔ (A − λ·In)T non inversible
⇔ AT − λ·In non inversible
⇔ λ ∈ Sp(AT)
.
Soient A et B
deux matrices semblables. Soit λ ∈ R.
On a les équivalences suivantes :
λ ∈ Sp(A)
⇔ A − λ·In non inversible
⇔ P−1(A − λ·In)P non inversible
⇔ P−1AP − λ·In non inversible
⇔ λ ∈ Sp(B)
.
Pour un endomorphisme
Soit
E un
espace vectoriel réel de dimension finie et
φ ∈ L(E) un
endomorphisme de
E.
Soit u ∈ E \ {0} un vecteur non nul et λ ∈ R.
On dit que u est un vecteur propre pour φ associé à la valeur propre λ si on a φ(u) = λ.u.
Le spectre de φ est l’ensemble de ses valeurs propres, noté Sp(φ).
- Tout vecteur non nul de E est un vecteur propre pour l'application idE.
- Les vecteurs propres d’un endomorphisme φ pour la valeur propre 0 sont les éléments de Ker(φ) ∖ {0}.
Un vecteur propre est toujours associé à une seule valeur propre pour un endomorphisme donné. En revanche, tout multiple d'un vecteur propre est aussi un vecteur propre associé à la même valeur propre, donc une valeur propre peut être associée à une infinité de vecteurs propres.
Un endomorphisme est
bijectif si et seulement s’il n’admet pas 0 comme valeur propre.
En dimension finie, un endomorphisme est bijectif si et seulement s’il est injectif, c’est-à-dire si son noyau est nul, autrement dit s’il n’a pas de vecteur propre associé à la valeur propre 0.
Le spectre d’un endomorphisme φ est l’ensemble des réels λ tels que
φ − λ·id n’est pas bijectif.
Pour tout λ ∈ R, pour tout vecteur u,
on a l’équivalence φ(u) = λ·u ⇔ (φ − λ·id)(u) = 0
donc λ est une valeur propre de φ si et seulement si 0 est une valeur propre de (φ − λ·id).
Tout endomorphisme bijectif a les mêmes vecteurs propres que l’endomorphisme réciproque avec les valeurs propres inverses.
Soit φ ∈ L(E) bijectif.
Pour tout u ∈ E ∖ {0}
et λ ∈ R∗ on a l’équivalence
φ(u) = λ·u
⇔ (1)/(λ)·u = φ−1(u).
Famille de vecteurs propres
Des vecteurs propres associés à des valeurs propres deux à deux distinctes pour une même matrice ou un même endomorphisme sont
linéairement indépendants.
On raisonne par récurrence sur le nombre de vecteurs propres pour une matrice ou un endomorphisme
A.
Un vecteur propre étant non nul, il constitue une famille libre.
Soit k ∈ N∗ tel que la propriété soit vraie pour toute famille de k vecteurs propres.
Soit (u1, … , uk+1) une famille de vecteurs propres de A. On note (λ1, … , λk+1) la famille des valeurs propres associées, supposées deux à deux distinctes.
Soit (a1, … , ak+1) ∈ Rk+1 tel que
∑i=1k+1
ai ui = 0.
Alors on trouve 0 = A(∑i=1k+1
ai ui)
= ∑i=1k+1
ai A(ui)
= ∑i=1k+1
ai λiui
donc par combinaison des deux sommes on trouve
0 = ∑i=1k+1
ai λiui
− λk+1 ∑i=1k+1
ai ui
= ∑i=1k+1
ai (λi − λk+1)ui
= ∑i=1k
ai (λi − λk+1)ui.
Or par hypothèse de récurrence, la famille (u1, … , uk) est libre
donc pour tout i ≤ k
on obtient ai (λi − λk+1) = 0
avec λi ≠ λk+1
donc ai = 0.
Finalement, la première relation se réduit à ak+1uk+1 = 0
donc ak+1 = 0. La propriété est donc satisfaite au rang k+1.
Une matrice de taille n ou un endomorphisme sur un espace vectoriel de dimension n ne peut admettre que n valeurs propres distinctes au plus.
Espaces propres
Dans cette partie, on considère une matrice carrée ou un endomorphisme A.
Pour tout λ ∈ Sp(A),
l'espace propre associé à la valeur propre λ pour A est le sous-espace vectoriel Eλ(A)
= Ker(A − λId).
L'ensemble des vecteurs non nuls de Eλ(A) est l'ensemble des vecteurs propres de A
associés à la valeur propre λ.
Les espaces propres d’une matrice et de sa transposée associés à la même valeur propre ont la même dimension.
Soit A ∈ ℳn(R) et λ ∈ Sp(A).
On a les égalités
dim(Eλ(A))
= dim(Ker(A − λ·In))
= n − rg(A − λ·In)
= n − rg((A − λ·In)T)
= n − rg(AT − λ·In)
= dim(Ker(AT − λ·In))
= dim(Eλ(AT)).
Soient λ1, … , λk des valeurs propres de A,
on note E1, … , Ek les sous-espaces propres associés.
Soit (x1, … , xk) ∈ E1 × ⋯ × Ek et
(y1, … , yk) ∈ E1 × ⋯ × Ek
tels que ∑i=1k xi
= ∑i=1k yi.
On trouve alors ∑i=1k (xi
− yi) = 0
avec pour tout i ∈ ⟦1 ; n⟧,
xi − yi ∈ Ei.
Si certains vecteurs de la forme (xi − yi) sont non nuls, la relation ∑i=1k
(xi − yi)
= 0 implique qu'ils forment une famille liée, ce qui contredit l'indépendance linéaire.
Les espaces propres associés à la même valeur propre pour deux matrices semblables ont la même dimension.
Soient
A et
B
deux matrices semblables. Soit
λ ∈ Sp(A).
On a les égalités
dim(Eλ(A))
= dim(Ker(A − λ·In))
= n − rg(A − λ·In)
= n − rg(P−1(A − λ·In)P)
= n − rg(P−1AP − λ·In)
= dim(Ker(B − λ·In))
= dim(Eλ(B)).
Soit
D une
matrice diagonale et soit
λ ∈ Sp(D). La
dimension de l'espace propre
Eλ(D)
est le nombre de coefficients diagonaux de valeur
λ.
Polynôme annulateur
Soit A une matrice carrée ou un endomorphisme. Soit P : x ↦ ∑k=0d
akxk un polynôme non nul.
On dit que P est un polynôme annulateur pour A si on a ∑k=0d
ak Ak = 0.
Toute valeur propre est racine des polynômes annulateurs.
Soit
A une matrice carrée ou un endomorphisme et
P : x ↦ ∑k=0d
akxk un polynôme annulateur de
A. Soit
λ ∈ Sp(A). On note
u un vecteur propre associé.
On trouve 0 = ∑k=0d
ak Ak(u)
= ∑k=0d
ak λk u
= P(λ).u
or u ≠ 0
donc P(λ) = 0.
En particulier, toute matrice carrée ou tout endomorphisme A admettant un polynôme annulateur avec un coefficient constant non nul est inversible et on peut expliciter cet inverse comme un polynôme en A.
Les seules valeurs propres possibles d’une
projection sont les réels
0 et
1.
Les seules valeurs propres possibles d’une
symétrie sont les réels
−1 et
1.