Revue culturelle d’

L’escargot est reputé pour deux caractéristiques essentielles : sa lenteur et sa coquille. Du coup, il peut être amusant qu’une entreprise évoque un aspect sans forcément vouloir attirer l’attention sur l’autre. J’avais repéré un jour sur autoroute une camionnette estampillée S-Cargo (s’agissait-il alors de la compagnie Cargo ?) et aujourd’hui encore une association de vélo partagé reprend le nom (de façon probablement plus assumée) d’S’Cargo. Le logo du TGV a aussi été remarqué pour sa ressemblance frappante avec un gastéropode lorsqu’on le retourne haut en bas.

C’est un motif récurrent des comptines comme dans Petit Escargot ou Escargot de Bourgogne, et des albums comme la Maison la plus grande du monde. Colette ne voit que lui pour mériter le nom de presbytère dans La Maison de Claudine. Et Gotlib en fait un sujet d’étude du professeur Burp dans le tome 5 de la Rubrique-à-brac, après avoir décrit le rude quotidien des éleveurs dans le premier tome.

Son indolence est magnifiée comme icône du mouvement Slow Food. A contrario, il est représenté dans les premières scènes de L’Histoire sans fin sous la forme d’une monture géante et rapide. Le même contre-emploi sert de trame au dessin animé Turbo.

Sa sexualité est décrite dans une scène torride du roman Les Fourmis de Bernard Werber, et s’il ne s’agit pas vraiment d’un symbole LGBT, son hermaphrodisme est facilement cité en contre-exemple à la binarité masculin-féminin.

Cette chronique serait-elle une plate excuse pour le temps que je mets à la publier ?

Sorties

Nous avons profité d’un bel ensoleillement pour nous balader dans les vignes de Durbach à l’entrée de la Forêt-Noire. L’un des chemins dans les bois était émaillé de petits schtroumpfs. Nous sommes montés jusqu’au château de Staufenberg qui offre une assez belle vue. Dommage que des avions de tourisme aient vrombi continuellement toute la journée, perturbant le calme de la zone.

À l’occasion des Journées européennes du patrimoine, nous sommes allés faire un tour au Château de Lichtenberg au nord du Bas-Rhin. L’édifice a été plutôt bien restauré, avec un auditorium et un théâtre de plein air, tout en valorisant les vestiges encore visitable de ce bâtiment médiéval devenu une place forte jusqu’à sa prise par l’armée du Wurtemberg à la fin du XIXe siècle.

Spectacles

Au Maillon, dans le cadre du festival Musica, All Right. Good Night. met en parallèle la disparition du vol MH370 de Malaysia Airlines avec la perte de mémoire du père de la metteuse en scène Helgard Haug. Le texte est presque intégralement diffusé en surtitrage tandis que sur scène des musiciens composent une scène visuelle et jouent la partition contemporaine mais très agréable de Barbara Morgenstern.

À l’Opéra national du Rhin, le contre-ténor Jakub Józef Orliński donnait un récital mêlant à la fois énergie et délicatesse, de l’humour et même un peu d’acrobatie. Il m’a donné bien envie de rechanter du Purcell.

L’ouverture de saison de Pôle Sud invitait Angela Rabaglio et Micaël Florentz pour présenter The Gyre : une danse un peu hypnotique fondée sur une révolution de leurs deux corps face public, dérivant progressivement dans la gestuelle et l’interaction. Le même soir, Konstantinos Papanikolaou nous a fait rire avec A User’s Manual – Chapter I & III, une pseudo-conférence sur un projet de chorégraphie à rebours des attendus.

Film

Mon fils est un film d’Eran Riklis montrant un jeune arabe israélien admis dans un établissement scolaire coté à Jérusalem, et qui en marge de ses cours s’occupe d’un autre garçon handicapé dont l’état se dégrade progressivement. Sans misérabilisme, l’histoire expose une réalité parfois amère mais résiliente, qui rappelle Va, vis et deviens, surtout avec Yaël Abecassis dans le rôle de la mère.

Littérature

Théâtre

Alice Zeniter, que j’ai déjà pu apprécier en roman et au cinéma, est l’autrice de Quand viendra la vague, mettant en scène un couple discutant sur les personnes à sauver sur leur ile-sommet face à la montée des eaux. C’est drôle, enlevé et léger.

La pièce Annemarie de René Zahnd parcourt la vie foisonnante d’Annemarie Schwarzenberg, artiste engagée et aventureuse malgré une famille favorable au pouvoir nazi. Mais l’écriture manque un peu de liant.

La Salle des profs de Liliane Wouters m’a plutôt déçu. Les enseignants décrits sont caricaturaux et vains. On pourrait penser que l’autrice veut régler un compte avec ses anciens collègues, mais il n’y a même pas de critique du système. Si encore ça se voulait drôle, ça irait rejoindre le niveau de la bande dessinée Les Profs. Las.

Bande dessinée documentaire

Quel contraste entre Mama Sapiens de Soline Bourdeverre-Veyssière et le Sapiens de Yuval Noah Harari ! Là où le second énonce avec fracas des généralités discutables sur notre passé, la version féminine offre une vision plus nuancée et surtout s’appuie plus explicitement sur les articles de recherche.

Les Contraceptés de Guillaume Daudin et Stéphane Jourdain aborde la question de la contraception masculine, son histoire, ses (très) lents progrès et la (très très) difficile acceptation de sa mise en œuvre par les hommes. Les auteurs traitent bien sûr les aspects biologiques mais aussi socio-culturels, politiques et économiques qui aboutissent à ce quasi-statu quo.

Lucie Knisley raconte son enfance et son expérience en cuisine et gastronomie dans Délices. Les souvenirs personnels alternent avec les recettes et les conseils, intéressants mais pas complètement apétissants à mon gout, culture américaine oblige.

Fabienne Lauret se présente comme Une féministe révolutionnaire à l’atelier avec l’aide de Philippe Guillaume et Elena Vieillard, dans une bande dessinée efficace et instructive.

Comment les riches ravagent la planète adapte l’essai d’Hervé Kempf en bande dessinée avec Juan Mendez. Le dessin est un peu rugueux et le propos pas vraiment réconfortant, mais au moins on ne s’y embarrasse pas de pincettes. J’ai bien aimé notamment le recours aux personnages d’Alice au Pays des Merveilles pour brosser le portrait des négationnistes du climat, et en particulier Jancovici en lapin blanc sautillant obsédé par le striatum.

Bande dessinée de fiction

J’ai adoré les mésanges anarcho-punks de La Cosmologie du futur par Alessandro Pignocchi. Dans un monde où les politiques se sont rendus à l’écologie, un ethnologue Jivaro explore avec émerveillement les curieuses coutumes du monde occidental.

Loumyx de Francesca Santi coche toutes les cases de cette science-fiction qui oppose la vilaine technologie avec la gentille nature. Je passe sur la puissance magique qui apparait toujours explicitement sous la forme de la femme aimée nue (est-ce qu’elle existe en version masculine pour celles et ceux qui auraient d’autres préférences ?) On se rattrape un peu sur le dessin joyeusement coloré.

Juanalberto, maitre de l’univers est l’histoire complètement foutraque d’un canard humanoïde aux prises avec des extraterrestres variés. On s’amuse un peu des nombreuses références à d’autres œuvres, mais on en garde aussi peu de souvenirs que d’un rêve abscons.

Sprague (Rodolphe et Roman) est graphiquement plutôt réussi, avec un synopsis assez standard : dans une cité à la technologie rudimentaire, deux hommes partent en quête de la mer qui a laissé la place à un désert de sable. Et puis essentiellement, après quelques péripéties de voyage ils parviennent à rouvrir un robinet fermé. Bon. L’ingénuité n’est pas répréhensible.

Miss Ruki enchaine les histoires courtes d’un quotidien banal. Le trait naïf de Fumiko Takano est à l’avenant du scénario sans grande consistance.