Revue culturelle de

Avec le succès de notre spectacle West Side Story en déconstruction au TAPS, mis en scène par Marion Grandjean, nous sommes quelques uns à souhaiter poursuivre l’aventure théâtrale ensemble. C’est l’occasion de faire un point sur tous les projets théâtraux auxquels j’ai participé en atelier.

En dehors d’un rôle d’ange dans Goulu et son âme de Pierre Gripari quand j’étais en classe de cinquième, mon aventure théâtrale a vraiment commencé quand je suis arrivé pour mes études à Lyon. On m’a d’abord confié le Capitaine Brice dans Arcadia de Tom Stoppard, puis avec une aide à la mise en scène de Séverine Puel, j’ai joué Moulineaux dans Tailleur pour dames de Feydeau, Lui dans L’Histoire des ours pandas racontée par un saxophoniste qui a une petite amie à Francfort de Matéi Visniec, et Pierre Curie dans Les Palmes de Monsieur Schutz de Jean-Noël Fenwick. Avec mon groupe de langue anglaise, j’ai tenu le rôle d’Adam Trainsmith dans Comic Potential d’Alan Ayckbourn. Je me suis essayé au solo avec le premier spectacle de Desproges, puis on m’a sollicité pour mettre en scène Arsenic et vieilles dentelles de Joseph Kesselring.

De retour à Lille, j’ai intégré l’atelier théâtre de l’université encadré par Sylviane Sokolowski où nous avons monté 11 septembre 2001 de Vinaver, ainsi qu’une pièce de Werner Schwab que j’ai oubliée. Nous avons alors créé l’association étudiante Les Arts osés pour continuer à jouer ensemble. J’ai pu mettre en scène et jouer des extraits de Théâtre sans animaux de Jean-Michel Ribes, puis Les Pas perdus de Denise Bonal et Paroles d’étoiles. Trois rôles m’ont profondément marqué à cette époque : Luc dans Les Muses orphelines de Michel Marc Bouchard et Noëlle Renaude, Aram dans Une Bête sur la Lune de Richard Kalinoski, et Paul dans L’Homme du hasard de Yasmina Reza. Malheureusement, cette dernière ne semblait pas vouloir que des amateurs jouent ses pièces, et j’ai dû abandonner ses Trois versions de la vie que je souhaitais monter dans le cadre de l’année internationale de la physique. En revanche, j’ai pu mettre en scène B.C.B.G. de Jean Bois. J’ai aussi participé aux Tables de lecture du Théâtre du Nord, avec des extraits de Trahisons de Pinter et Du luxe et de l’impuissance de Lagarce entre autres. À la fin de ma thèse et donc de mon statut étudiant, j’ai quitté l’association et rejoint l’atelier de la Virgule à Tourcoing mené par Éric Leblanc, où j’ai joué entre autres une reprise de la scène anthologique du Mépris. S’en sont suivies quelques années où j’ai délaissé le théâtre pour le chant, ce qui m’a donné quand même l’occasion de jouer l’extraterrestre A440 dans Émilie jolie. Avec l’association de guitaristes Cord’Accord, j’ai aussi mis en voix Le Tour du monde en quatre-vingts jours de Jules Verne, La Prose du Transsibérien de Blaise Cendrars, ainsi que des poèmes de Louise Labé, Clément Marot et Federico García Lorca.

Rejoignant l’association de théâtre Artistigre pour parents et enfants, j’ai commencé à animer un atelier où nous avons mis en espace d’abord des albums jeunesse : Sssi j’te mords, t’es mort (Pierre Delye), Mais, ce n’est pas un monstre ! (Angela McAllister), L’Arbre roux (Idatte, Trublin), Roule galette (Caputo, Belvès), Le métro mé pas tro (Yak Rivais), Où sont les fantômes ? (Fiona MacLeod), Grignotin et Mentalo présentent… (Delphine Bournay). Les enfants grandissant, nous sommes passés à des textes qui exigent un peu plus de maturité avec Musée haut, musée bas de Jean-Michel Ribes et les Fables de La Fontaine. Puis je me suis mis à adapter des classiques : Alice au Pays des merveilles de Lewis Carroll et L’Odyssée d’après Homère.

Les années covid et un déménagement ont mis fin à cet atelier. L’année dernière, j’ai rejoint la Maison Théâtre sur un projet de Violaine Helmbold qui m’a permis de partager le rôle d’Ajac dans Pluie de cendres de Laurent Gaudé. Il est prévu que nous rejouions West Side Story l’année prochaine, mais d’ici là, quel sera notre programme ?

Évènements

Nous avons fait un tour à la fête médiévale de Chatenois, qui n’a certes pas la même ampleur que celle de Brie-Comte-Robert, mais qui a l’avantage d’être plus accessible pour nous désormais. Après une petite parade médiévale-fantaisie, quelques animations étaient proposées (musique, combats…) entre les habituels stands de tisane, gemmologie, épées en bois et autres vêtements et matériels de reconstitution. Directement depuis les remparts, les sentiers balisés par le Club vosgien permettent de se promener un peu en forêt aux abords de Kintzheim.

Le Théâtre national de Strasbourg a eu la bonne idée de proposer à ses abonnés des Tables à palabres pour découvrir des métiers de la scène. Je n’avais pas pu assister aux deux premières sessions, mais j’ai beaucoup aimé la présentation de Baudouin Woehl sur la dramaturgie. Formé au TNS dans ce domaine, il a bien expliqué que dans son cas il ne fallait pas entendre dramaturge au sens d’auteur dramatique, mais comme chargé de l’analyse des différentes lectures de l’œuvre et premier spectateur de la mise en scène. Il a montré en particulier la méthodes des atlas qui consiste à construire une sorte de catalogue de photos, textes, séquences de films… qui ouvrent la perspective sur le travail en cours.

Vidéo

Le Monty Python Flying Circus est une série de sketches de la célèbre troupe d’humoristes britanniques, rassemblés en un coffret rempli de nonsense, avec des animations en découpages de Terry Gilliam, un naufragé hagard monosyllabique, des commères rouspéteuses, un chevalier en armure muni d’un poulet plumé, Super Réparateur de vélo…

Littérature

Science

Le français va très bien, merci nous rassurent les linguistes atterrées dans un petit fascicule publié ce printemps, qui démonte les discours alarmistes des doctes donneurs de leçon sur l’état de la langue française.

Toujours aussi génial, Randall Munroe a sorti son deuxième tome de What If? pour répondre avec beaucoup d’humour et de rigueur scientifique à des questions farfelues mettant en jeu des concepts de physique générale. La plupart des textes sont disponibles sur son blog (en anglais).

Romans

Pantagruel est le premier livre de Rabelais, narrant les aventures d’un géant lettré, fils de Gargantua et compagnon d’un hurluberlu assez canaille mais non moins lettré du nom de Panurge.

John Steinbeck raconte dans Des Souris et des Hommes l’embauche de deux travailleurs saisonniers dans un ranch américain du début du XXe siècle : Georges et Lenny. Ce dernier, à la fois très fort et mentalement limité, caresse compulsivement les souris et d’autres petits animaux, qu’il finit inévitablement par tuer par maladresse.

Théâtre

Merci à Laura de m’avoir incité à lire Alexis Michalik. J’ai commencé par Une histoire d’amour, à la fois juste, drôle et touchante, qui de temps forts en ellipses nous emporte sans mièvrerie.

Un grand cri d’amour (Balasko) met du théâtre dans le théâtre, avec deux comédiens sur le retour qui se retrouvent après leur séparation pour jouer un couple. L’histoire n’a rien d’extraordinaire, mais les dialogues sont verts. Les deux autres pièces du recueil, Nuit d’ivresse et L’Ex-femme de ma vie sont plus datées.

La Maison Théâtre rassemble 14 textes courts pour adolescents dans Divers Cités. J’ai particulièrement apprécié les écritures de Manon Ona et Catherine Verlaguet, dynamiques et touchant des sujets sensibles.

Deux personnages enchainent les saynètes dans Les Diablogues de Roland Dubillard avec un humour souvent absurde et un peu daté. Le Compte-gouttes et La Pluie sortent un peu du lot.

J’ai bien aimé le début du Menhir de Jean Cagnard, même si l’histoire part assez vite en cacahuète. Il faut que je voie ce qu’il a écrit d’autre.

Il est assez troublant de lire La Scène de Valère Novarina avant d’aller se coucher. Le cerveau embraye sur une sorte de logorrhée absconse qui peut se révéler amusante à force.

Fabrice Melquiot est l’auteur de Salât al-Janaza, dans laquelle divers personnages aux liens flous se rencontrent en Algérie ou à Paris, dans un taxi ou un cimetière.

Le Crime du XXIe siècle est une pièce d’Edward Bond avec des dialogues dans une langue presque sans verbe, entre des personnages en fuite, assoiffés, mutilés, recherchés. Bref, ce texte ne me fait vraiment pas envie, mais nourrit ma réflexion sur la théâtralité.

Confiture russe se présente un peu comme un hommage de Lioudmila Oulitskaïa à Tchékhov. Dans une datcha en déliquescence, une famille se crêpe le chignon entre deux répliques sur l’âme russe.

After sun et L’avantage avec les animaux, c’est qu’ils t’aiment sans te poser de questions sont deux pièces antipodiques de Rodrigo García. En tout cas, c’est ainsi qu’il les présente. Je n’accroche vraiment pas à cette écriture outrée, négative, comme un kyste gênant dans le panorama théâtral (selon ses propres termes).

Bande dessinée et récits graphiques

De cape et de crocs est très subjectivement l’une des meilleures bandes dessinées au monde, sur un scénario d’Ayroles (dont je vous conseille également la série Garulfo) et avec les dessins précis et colorés de Masbou. J’attends d’ailleurs avec impatience d’assister à la thèse de Paul Chibret sur ces aventures très référencées d’un renard, un loup et un lapin dans la Venise du XVIIe siècle, sur les traces d’un trésor de la Terre à la Lune, puis auprès d’un Maitre d’armes au grand nez. Fabuleux.

Merci à Gabriel de m’avoir conseillé Plastok, petite fable pétillante de Maud Michel transposant des jeux de pouvoirs et de destin dans une civilisation insecte vivant sur les vestiges de la pollution humaine.

Les Fables nautiques de Marine Blandin rassemblent un écosystème de baigneurs dans un centre nautique en circuit fermé qui rappelle un peu les athlètes de W ou le souvenir d’enfance. Le trait léger et coloré contraste avec le contexte qui devient graduellement plus oppressant. Une bonne surprise à relire.

Dans Vacances, Nicoby décrit des amours adolescentes insouciantes dans un camping en bord de mer. Plus dure sera la chute.

The Time Before est un conte moderne sur le très classique retourneur de temps. Est-ce que réussir sa vie, c’est parvenir à effacer toutes ses erreurs ?

Ferri nous emmène avec De Gaulle à la plage, une série de gags avec un Général à la retraite figé dans ses mimiques et son rapport parfois autoritaire avec son entourage. C’est amusant mais moins jubilatoire que sa coscénarisation du Retour à la terre avec Larcenet.

V pour Vendetta est un monument de la culture anarchiste britannique d’Alan Moore et David Lloyd. Il exploite le masque emblématique de Guy Fawkes pour une sorte de super héros contre les puissants corrompus d’une société fasciste, avec une technologie de surveillance qui évoque implicitement 1984. L’ensemble est intéressant mais assez daté.

Jean-Baptiste de Panafieu propose dans Extinctions : le crépuscule des espèces une réflexion sur les menaces présentes et passées sur la biodiversité, racontée autour d’une mission scientifique en Antarctique. Le résultat est assez didactique mais on peine à s’intéresser aux relations construites entre les protagonistes.

Cailleaux et Bourhis entament avec Prévert, inventeur une série biographique sur le poète, qui apparait ainsi beaucoup moins gentillet qu’on se l’imagine quand on apprend ses textes à l’école. Je l’ai même trouvé plutôt antipathique dans sa désinvolture parfois désagréable à l’égard de ses contemporains. Si ce n’était pas le but, peut-être aurait-il été plus judicieux de travailler sur l’ambivalence ou de mettre en parallèle sa prose éternelle.

Dans Kosmos, Perna et Bedouel partent sur une hypothèse plutôt amusante au départ : et si les astronautes américains, en arrivant sur la Lune, avaient découvert le drapeau soviétique planté auparavant par une autre mission habitée ? Le dessin en noir et blanc soigné nous fait imaginer ce qui aurait pu se passer si l’URSS avait devancé le programme spatial des États-Unis. Mais le récit se termine sur un discours assez nettement complotiste, ramenant les faits historiques à un argument d’autorité. Dommage.