Revue culturelle de

Je me suis souvenu l’autre jour de Hu’s on First, dialogue fictif entre George W. Bush et Condoleezza Rice, écrit par James Sherman, dans lequel l’ancien président des États-Unis demande le nom du nouveau dirigeant de la Chine, mais prend la réponse (Hu) pour une question par homophonie avec le pronom Who (« Qui ? »). Le titre fait référence au sketche Who’s on First d’Abott et Costello, qui exploitent la même confusion avec des noms de joueurs de baseball. Certaines répliques sont d’ailleurs reprises dans le film Rain Man, où le personnage incarné par Dustin Hoffman répète en boucle la question lorsqu’il est stressé.

Raymond Devos avait imaginé une situation similaire dans À Caen les vacances ? en jouant sur l’homophonie entre Caen et quand. La même méprise aurait déjà été feinte par un guichetier de la SNCF à Paris (mais pas à la gare Montparnasse, sinon c’est trop facile). De même dans Le Dîner de cons de Francis Veber, on trouve un exemple de quiproquo lexical lorsque Pierre Brochant (Thierry Lhermite) tente d’expliquer le prénom de son (ex)-ami Juste Leblanc.

J’ajoute à cette série Sith down, l’épisode 497 de Yodablog, dans lequel l’empereur cherche un Sith, après avoir essayé d’assurer son parc dans l’épisode 402 : War(ranty).

Pas de malentendu entre nous, cette revue culturelle sera brève.

Spectacles

Au TAPS, Amina Adjina met en scène son Histoire(s) de France avec trois jeunes comédiens qui rendent assez justement les mots et les manières de collégiens. On comprend assez vite que la réalité historique n’est pas l’objet du spectacle, qui part d’une courte sélection d’évènements marquants pour interroger assez pertinemment l’appropriation de cette culture commune, en particulier dans le contexte scolaire. J’ai apprécié aussi l’insertion de véritables textes d’adolescents des plusieurs collèges et groupes scolaires de la région.

Au Maillon, le collectif brésilien Instrumento de Ver et la troupe du Troisième Cirque nous emporte dans ses 23 fragments de ces derniers jours. Dynamique, joyeux et parfois un peu troublant dans son rapport au corps qui fait semblant d’être malmené, le spectacle joue avec les sons, un peu d’humour, une narration mosaïque et des effets de répétition qui n’en sont pas vraiment. Je me suis rendu compte après coup que la circographe Maroussia Diaz Verbèke qui assure ici la mise en scène était déjà à l’œuvre dans Le Vide, épatante relecture du mythe de Sisyphe d’Albert Camus, au Théâtre du Nord en 2015.

Au TNS, Princess Isatu Hassan Bagura joue son propre texte Great Apes of the West Coast. Volontairement libre dans son approche de la scène, elle confronte la vision cartésienne avec une identité revendiquée, évoque une enfance tour à tour favorisée ou douloureuse au Sierra Leone, dont elle conte aussi l’histoire dans un anglais à l’élocution impeccable, tout en variant les accents selon les personnages qu’elle incarne.

Au TNS également, j’ai été moins convaincu par Fajar ou l’odyssée de l’homme qui rêvait d’être poète. Pourtant, j’ai bien aimé le jeu d’Adama Diop, également auteur et metteur en scène du spectacle. La musique était belle, le propos consensuel, il y avait même un peu d’humour, mais je reste un peu dubitatif quand un spectacle de théâtre se déroule à plus de trois quarts du temps sur du film enregistré.

Littérature

Théâtre

J’aime beaucoup la tension des pièces de Harold Pinter. L’Anniversaire ne fait pas exception, avec un jeune homme seul pensionnaire d’une maison d’hôtes en bord de mer, rejoint inopinément par deux hommes qui cherchent à lui faire sa fête, dans tous les sens du terme.

Dans Les Rêveurs, Christophe Pellet confronte l’amour et la mort à la question du genre à travers quatre personnages dont les relations deux à deux s’entrecroisent. L’écriture est sensible et plutôt bien tournée.

Daniel Pennac rend un double hommage à son frère et à la nouvelle de Melville dans Bartleby mon frère. Le principe est intéressant mais le propos est assez spécifique à l’auteur.

J’ai été plutôt déçu par Y la disparition d’Ange Lise, qui imagine une forte diminution du ration homme/femme à la naissance. Le thème me travaille depuis un moment déjà, et j’étais curieux de voir ce que donnerait le traitement théâtral. Mais les scènes indépendantes ne parviennent pas à donner vraiment une assise à la situation.

Bande dessinée et récits graphiques

Gaëtan et Paul Brizzi mettent en images une très belle adaptation de L’Automne à Pekin d’après le roman de Boris Vian. On retrouve l’univers fantaisiste et les personnages bien trempés, soulignés par un trait chaleureux et coloré.

Voici encore un bel ouvrage de Wilfrid Lupano avec Stéphane Fert : Blanc autour, l’histoire vraie d’un pensionnat de jeunes filles qui commence à accueillir des Noires dans la première moitié du XIXe siècle aux États-Unis. On pourrait dire que ça ne se passe pas bien, et pourtant cette démarche volontariste est précurseure des changements politiques et sociaux qui vont faire reculer l’esclavagisme et le racisme, même si deux siècles plus tard tout n’est pas encore gagné.

Dessins politiques rassemble des planches de Mix et Remix dont j’apprécie depuis longtemps l’humour et le trait, notamment dans Courrier international. De 2005 à 2015, on y suit différents conflits dans le monde, l’affaire DSK et jusqu’au mouvement « Je suis Charlie ».

J’étais curieux de découvrir The Power of the Dark Crystal, une suite en BD du remarquable film d’animation de Henson et Oz. Le scénario de Simon Spurrier et Phillip Kennedy Johnson introduit une jeune fille de feu mais recourt de nouveau à la fragmentation du cristal pour faire réapparaitre les mêmes Skeksès. Quant au dessin de Kelly et Nichole Matthews, il reproduit les traits des personnages et diverses créatures mais ne parvient pas à rendre le charme des marionnettes.

Promethium (La Croix, Pitron) part d’un constat tout à fait réel d’une forte dégradation des écosystèmes dans la course aux terres rares, et de la violence des puissances qui veulent s’accaparer ces ressources. Mais le scénario de manque de données précises dans son argumentation documentaire et de l’autre côté ne parvient pas à tirer une narration efficace dans l’approche fictionnelle. On reste dans un entre-deux qui nous laisse sur notre faim.

Jeunesse

Flix est un album de Tomi Ungerer qui raconte la naissance d’un chien dans une famille de chats. D’abord rejeté, Flix fait preuve de qualités humaines (hum !) auprès des uns et des autres pour tisser une bonne entente entre les deux espèces.