Revue culturelle de

Certaines formules sont marquantes par l’usage de la rime ou de mots commençant avec la même lettre, parfois les deux comme en anglais dans Publish or perish, en italien avec traduttore, traditore ou en russe avec ни пуха ни пера. On peut citer d’autres associations de mots dans lesquelles les répétitions de graphèmes ou de phonèmes renforcent la relation sémantique : la Belle et la Bête, le fond et la forme, trick or treat, ça passe ou ça casse, veni, vidi, vici, et bien sûr pour terminer, last but not least.

Spectacles

Au TAPS, Vivarium est une adaptation très réussie du roman Gros-Câlin de Romain Gary (sous le pseudonyme d’Émile Ajar). Seul en scène, Fred Cacheux incarne ce personnage touchant et complexé de Monsieur Cousin, rêvant d’une relation avec sa collègue de bureau, mais ne sachant comment lui faire accepter la présence de son python de compagnie. C’est drôle et délicieusement aigre, avec un décor très simple et un tempo efficace.

L’Opéra national du Rhin nous propose une Petite balade aux enfers, qui adapte à un public jeunesse la partition d’Orphée et Eurydice de Gluck. Le recours aux grandes marionnettes concrétise avec humour le récit mythologique, avec une distribution vocale réduite mais très plaisante (même si davantage d’articulation aurait sans doute été préférable pour le jeune public). Toute la famille profite du spectacle.

La nouvelle directrice du TNS, Caroline Guiela Nguyen, est arrivée avec Fraternité, conte fantastique, à mi-chemin entre science-fiction et onirisme. Visuellement très léché, avec projection vidéo et décor aseptisé, le spectacle nous projette dans une humanité déboussolée par la disparition aussi soudaine qu’inexplicable de la moitié des êtres humains. Les familles démembrées envoient des messages à travers l’espace, tandis que le rythme du cosmos même semble ralentir. J’ai bien aimé le jeu sur la diversité des langues des personnages, mais les affirmations pseudo-scientifiques sonnent complètement faux, ce qui m’a empêché de rentrer vraiment dans l’histoire.

Trois comédiens jouent les trois comédiens d’Histoire d’amour (derniers chapitres) au TAPS, sans toutefois réussir à nous faire profiter vraiment de cette écriture à plusieurs niveaux de Jean-Luc Lagarce.

Au TNS, Un sentiment de vie est une pièce dite par une comédienne seule en scène, sans décor, sans déplacement. Elle chante un peu, raconte la fascination qu’avait son père pour Frank Sinatra. D’autres que moi y ont vu l’expression du processus d’écriture.

Vidéo

Merci à Bertrand qui m’a prêté Les Alsaciens ou les deux Mathilde. Ce téléfilm en quatre épisodes permet d’appréhender le rapport des Alsaciens à l’histoire de leur région. L’œuvre est didactique et la réalisation un peu datée, mais la distribution est suffisamment efficace pour nous faire voyager sur presque un siècle et trois guerres.

J’ai pris un peu par hasard À bord du Darjeeling Limited de Wes Anderson, dont j’avais apprécié le Grand Budapest Hotel. Ici trois frères se retrouvent en Inde dans une sorte de voyage mystique, tentative de réconciliation familiale après le décès de leur père. C’est un peu barré, avec un peu d’humour nonsense.

Littérature

Poésie

Les textes de Christian Bobin dans Noirclaire semblent rassembler les fragments d’une personne qui fut et qui n’est plus là. Son absence émaille un regard sur les choses du quotidien, le passage du temps. J’ai bien aimé le phrasé et sa douceur.

Bande dessinée et récits graphiques

J’ai relu avec beaucoup d’intérêt Economix de Michael Goodwin et Dan E. Burr. Il s’agit en fait moins d’une BD sur les principes économiques que sur l’histoire économique des États-Unis (et du monde en général par interaction). Le résultat est très clair, bien documenté, agréable à lire et instructif. Il est également accessible sur le blog de l’auteur.

Avec la sortie du 4e tome de l’intégrale de Capricorne, j’ai pu relire cette série de 20 albums d’Andreas, dont j’aime beaucoup à la fois la construction narrative et le traitement graphique. Disons pour faire court que ce récit fantastique met en scène un astrologue énigmatique aux prises avec des organisations secrètes un surnaturel qui interroge les notions d’identité, de géométrie, de destin et d’architecture. À lire et relire, il y a toujours des informations cachées qu’on ne découvre qu’après coup.

Du même auteur, La Caverne du souvenir revisite le folklore des légendes de Bretagne en un seul épisode qui porte son personnage principal au-delà de la mort. Peut-être.

Éléments de langage – Cacophonie en Francophonie (Bertin Leblanc et Paul Gros) nous fait vivre les préoccupations de l’organisation de la Francophonie, entre relations diplomatiques, gestion des médias et coups politiques. On pense à l’excellent Quai d’Orsay, mais ici point de salut. On a vraiment l’impression que l’organisation est le jouet des puissances occidentales et se retrouve réduite à un rôle de façade.

Бестужевки (Bestoujevki) relate la difficile mise en place de la première université pour femmes en Russie à la fin du XIXe siècle. Le chapitrage d’Anna Roussinova et Dmitri Goussev est un peu didactique et les personnages auraient pu être approfondis pour qu’on s’attache davantage à leur histoire, d’autant que l’illustratrice Tatiana Tsirlina a vraiment travaillé la différenciation de leurs visages.

Poussin bleu est une série en deux albums de Sagace et Monsieur le Chien. Je connaissais ce dernier d’après sa collaboration avec Odieux Connard, lequel navigue dans le même genre d’humour, très peu politiquement correct. Un jeune poussin est élevé comme champion d’une déesse pour un affrontement olympien, et contre toute attente parvient à se maintenir jusque dans l’arène. Dans le même genre de farce, je préfère relire Traquemage.

Les personnages de Star Wars s’en vont en gags (très référencés) dans La Revanche du retour de la guerre du retour contre-attaque de Thierry Vivien. C’est souvent au dessus de la ceinture, surtout lorsque certains se font sabrer et que le dessous est à côté. Dommage que Yodablog ne soit plus actif depuis fin 2020.

Dans Ma Vie posthume (Hubert et Zanzim), le personnage principal est une morte qui continue à penser et se mouvoir, bref à vivre, même si elle n’a plus besoin de manger. Elle va chercher à comprendre ce qui lui est arrivé et les raisons de son état. C’est une histoire gentillette et un peu romantique.

L’Honneur des Tzarom n’a pas l’humour aussi efficace que dans les autres bandes dessinées de Wilfrid Lupano. Ici d’improbables tziganes de l’espace montent une opération rocambolesque malgré la présence du jeune avocat chargé de défendre la mère de famille.

La bande dessinée Spinoza, à la recherche de la vérité et du bonheur (Philippe Amador) retrace efficacement des éléments biographique du philosophe. Je ne suis sans doute pas assez versé dans cette discipline pour apprécier à sa mesure la réflexion sur la raison et le savoir qui y est déroulée.